Description du projet

Le quai de Ouistreham de Florence AUBENAS , journaliste au Nouvel observateur

Éditions de l’olivier  19€

Caen (calvados), le canal Napoléon III qui relie la ville à la Manche…au bout le port d’Ouistreham, la mer …et le quai du FERRY qui assure la liaison avec l’Angleterre…Florence Aubenas retrace avec simplicité, pudeur, humour et émotion son « immersion » parmi les salariés précaires. Au bout d’une quête de 6 mois, elle obtiendra un CDI et arrêtera  ses recherches…

Pôle emploi, agences d’intérim, agence de recrutement, «  boîtes » de ménage, elle passe par toutes les étapes, signalant au passage, la privatisation de pôle emploi et les ravages causés par la fusion ANPE/ASSEDIC tant pour les employés que pour les chômeurs.

Elle dresse  le portrait de ces travailleurs (euses) pauvres,  celles et ceux qui tentent  de survivre avec 700 euros par mois, parfois moins ; de ces « rien »,  comme  ces femmes, Mauricette, Marilou, Victoria, Suzy, ces hommes, Philippe, dont  elle a partagé la vie, la fatigue, les horaires hachés, le transport éreintant, une heure par-ci, une heure par là, (sur le Ferry : 1h par jour 6 jours sur 7,  au taux horaire inférieur à 8,70€ brut) ;  ses genoux écorchés parce que, dans le Ferry, elle avait été désignée d’office, puisque c’est une femme, à « faire les sanis» – les WC -

L’abattage écrira Florence Aubenas.

Elle rend compte également de la situation des salariés du Calvados, touché de plein fouet par la crise actuelle, et passée, et de la résistance de la population,  de la lutte  des classes :

Mars 2009 : « Stéphane n’a pas trente ans. Il vient de se faire virer de chez Trucks, comme plus de 700 intérimaires. Dans un sourire mince il dit: «J’ai de la chance. Les gars ont été sympas : ils ne m’ont pas jeté du jour au lendemain, j’ai pu finir mon contrat.» Chez Trucks, un des patrons a annoncé l’autre jour que le carnet de commandes avait chuté des deux tiers. Les chaînes de montage tournent de moins en moins le week-end, les gars sont au chômage technique la moitié du mois. Dans les ateliers, on n’entend plus parler que de ça: les départs, comme on dit. Personne ne sait ce qui va se passer, ni pour qui, ni pour combien. Parfois, des gars disent qu’il vaudrait mieux partir de soi-même, plutôt qu’attendre d’être jeté comme un mouchoir. Ils disent: «D’une manière ou d’une autre, qu’on en finisse. On devient fous. » (…)

Il y avait aussi la SMN, la Société Métallurgique de Normandie (la dernière coulée eut lieuen 1993), baptisée la «forteresse ouvrière », une des légendes industrielles de Caen avec ses 7 000 bonshommes derrière des hauts-fourneaux qui soufflaient leur humeur à toute la ville et terminaient généralement leurs manifestations à coups de nerf de bœuf. On le dit aujourd’hui, c’est miracle qu’il n’y ait jamais eu de morts. Et Jaeger? Et Citroën? Et la Radiotechnique? Et Blaupunkt, qui a changé de nom trois fois, avant de devenir Valeo? Plus de 20000 emplois ouvriers étaient répartis dans huit grandes usines, nouées en collier autour de Caen (….) Moulinex fut la dernière grande à fermer en 2001.(….)

 Ce 19 mars 2009, (à Caen) la manifestation grossit toujours, mais sans colère, sans slogan réel, comme si sa seule revendication était sa propre masse. Gigantesque, démesurée, la foule a même fini par engloutir ceux qui l’avaient convoquée, les syndicats. On distingue parfois un chant, un drapeau, flottant au-dessus des têtes, comme une bouée davantage que comme un signe de ralliement. Le cortège ne semble plus porté ni par les certitudes, ni par les doléances, mais traversé seulement de questions, qui volent de groupe en groupe : «Combien on est? Qu’est-ce qu’on va faire? Jusqu’à quand ça va durer? Où on va?»

F.L

Repères

Chômage en Basse Normandie

En hausse de 18,4%, la reprise du chômage en Basse-Normandie (Calvados, Orne et Manche) est importante. Cette hausse est sensiblement plus élevée que celle survenue au niveau national (+ 11,7%). Ce sont, au total, 50 500 demandeurs d’emploi qui étaient inscrits à l’ANPE à la fin de l’année 2008. Les jeunes sont particulièrement touchés: leur part parmi les demandeurs d’emplois est passée de 23,5% à 25,5%(soit 6322)   en l’espace d’un an et les femmes : 24340 (soit +2,1% en 1an)
Le recul de l’emploi s’est très fortement accentué au cours des quatre premiers mois de l’année 2009, 6 800 personnes supplémentaires s’étant inscrites au Pôle emploi (ex-ANPE) au cours de cette période.

L’emploi salarié a reculé de 0,8% en 2008, ce qui représente 4 100 emplois en moins. C’est surtout l’industrie qui est affectée, avec une baisse des effectifs de 4 700 personnes en l’espace d’un an. Le nombre d’intérimaires a, par exemple, baissé de moitié entre les quatrièmes trimestres 2007 et 2008 dans le secteur automobile et de 20% dans les industries agroalimentaires

Pour le Calvados (Caen préfecture) :

En janvier 2010 : 8610 chômeurs (catégorie 1,2 et 3)  soit 9,6% de la population active